Diana Krall

Dans l'univers du jazz, il y a des règles tacites. Elles affirment que les musiciens fidèles au mode acoustique n'auront pas des albums or ou platine, et qu'ils ne rempliront pas de grandes salles soir après soir. Selon ces règles, les disques purement et simplement de jazz ne peuvent pas atteindre les premières places du palmarès Billboard. Et les artistes de jazz ne doivent pas s'attendre à ce qu'on leur fasse des ovations au Lilith Fair, ni qu'ils soient proposés avec Santana, TLC, les Backstreet Boys et les Dixie Chicks à une catégorie des Grammy®.

Cependant, depuis dix ans quelqu'un échappe régulièrement à ces règles, démontrant clairement qu'un musicien de jazz peut atteindre un succès populaire sans sacrifier ses fondements de jazz. L'artiste en question s'appelle Diana Krall. Cette chanteuse/pianiste canadienne est non seulement devenue l'artiste le plus vendu du palmarès Verve, mais elle a atteint en plus le statut de vocaliste de jazz le mieux vendu en général. Indiscutablement vouée au jazz, elle est restée fidèle à ses racines bop et swing.

S'étant fait connaître jusque là par l'intermédiaire de ses enregistrements en studio, Krall fait un pas en avant lorsqu'elle enregistre Live in Paris, son premier album en concert. Produit par l'équipe gagnante d'un Grammy®,dont Tommy LiPuma est le président, « Verve Music Group », avec,comme ingénieur de son, Al Schmitt, collaborateur de longe date, Live in Paris présente les points culminants des concerts de Krall à l'Olympia fin novembre et début décembre 2001.

Krall travaille avec un ensemble cohérent et intuitif, dont le bassiste John Clayton, le batteur Jeff Hamilton et le guitariste Anthony Wilson. Pour certains morceaux du disque, elle est accompagnée également par John Pisano (guitare acoustique) et par le percussionniste brésilien Paulinho Da Costa (que l'on entend sur certains disques de nombreux grands artistes depuis Michael Jackson et Madonna jusqu'à Gato Barbieri). Alan Broadbent sert de directeur musical/chef de l' »Orchestra Symphonique European » lors des spectacles européens du groupe, et bien qu'il soit un pianiste bop/post bop expressif, Krall se charge de jouer elle-même le piano tout au long des spectacles.

Elle explique : « Mes chanteurs préférés jouaient tous du piano : Dinah Washington, Roberta Flack, Shirley Horn, Andy Bey, Aretha Franklin, Sarah Vaughan et surtout Carmen McKae. Elle a été très importante pour moi; elle est une des artistes qui m'ont le plus influencé. Mais Nat 'King' Cole était le maître absolu. » Live in Paris illustre la diversité du répertoire de Krall. Elle a non seulement une grande connaissance des célèbres standards Tin Pan Alley des années 1920, 1930 et 1940, mais elle connaît aussi les chansons des années 1960, 1970, 1980 et 1990. Son amour du Tin Pan Alley se manifeste dans son interprétation 'swing' de « Let's fall in love » de Harold Arlen, « I've got you under my skin » de Cole Porter, et « 'S' Wonderful » de George et Ira Gershwin.

Elle exerce aussi son art de l'interprétation lorsqu'elle reprend le classique des années 1950 « Devil May Care » du chanteur bop Bob Dorough, la chanson de Joni Mitchell « A Case of You », et le succès de Burt Bachorach/Hal David « The Look of Love. » Krall a choisi aussi deux chansons du répertoire de Peggy Lee : «'Deed I Do » et « I love Being Here with You », ainsi que la chanson de Bart Howard « Fly me to the moon », que Frank Sinatra a rendu célèbre. La seule piste du disque qui n'est pas tirée des concerts parisiens à l'Olympia est un enregistrement en studio du succès 1977 de Billy Joel : « Just the Way You Are », que Krall avait enregistré pour la trame sonore du film The Guru. Sur cette piste elle est accompagnée par Anthony Wilson, ainsi que par le saxophoniste ténor Michael Brecker, le bassiste Christian McBride (avec qui elle a souvent travaillé), le batteur Lewis Nash et le percussionniste Luis Quintero.

Née à Nanaimo en Colombie Britannique (près de Vancouver), Krall grandit dans l'ouest du Canada et commença à étudier le piano dès l'age de quatre ans. Elle a été nourrie de jazz et, à l'âge de 15 ans, elle jouait déjà les chansons de jazz les plus connues dans un restaurant/bar local. Son intérêt pour le jazz fut fortement encouragé par son père, pianiste 'stride' ayant des vastes connaissances sur les pianistes des années 1920 et 30 comme Fats Waller, James P. Johnson et Carl 'Fatha' Hines. Krall affirme : « Je crois que mon père avait tous les disques de Fats Waller, et moi, j'ai essayé de tout apprendre. » Krall était encore adolescente lorsqu'elle obtint une bourse d'études pour le prestigieux Berkley College of Music à Boston.

Après deux ans à Boston, elle déménagea à Los Angeles, où elle rencontra quelques grands du jazz, y compris John Clayton,le pianiste/chanteur Jimmy Rowles et le bassiste feu Ray Brown, qui lui donna beaucoup d'encouragement et qui l'accompagna pour l'enregistrement de certains de ses albums des années 1990. Krall arriva à Toronto après avoir vécu trois ans à Los Angeles, et ce fut une compagnie de disques canadienne qui donna à la chanteuse/pianiste l'occasion d'enregistrer pour la première fois.

En 1993, Justin Time Records de Montréal enregistra son premier album, Stepping Out. Mais Krall, qui habite maintenant New York, n'est pas restée avec Justin Time très longtemps. En 1994 elle signa un contrat avec GRP et enregistra Only Trust Your Heart, accompagnée par le bassiste Ray Brown et par le saxophoniste ténor Stanley Turrentine. Cet Album marqua le début de sa collaboration avec Tommy di Puma (qui a travaillé avec tous les grands depuis Barbara Streisand à Natalie Cole et George Benson). Après avoir produit Only Trust Your Heart, Li Puma a produit plusieurs autres albums de Diana Krall pour GRP, Impulse! et Verve, y compris All for You : A Dedication to the Nat 'King' Cole Trio en 1995, Love Scenes en 1997, When I Look in Your Eyes en 1998 et The Look of Love en 2001. LiPuma remarque : « C'était la première fois que j'avais produit autant de disques de suite pour un artiste. Diana et moi, on s'entend si bien que tout devient facile. Lorsque l'un d'entre nous fait une suggestion, l'autre écoute vraiment. On a beaucoup de respect l'un pour l'autre. »

Au cours des années 1990, la popularité de Krall ne cessa de croître. Les Albums Only Trust Your Heart, All for You et Love Scenes se vendirent très bien mais ce fut When I Look in Your Eyes qui assura le succès commercial de Krall. En 1998 et 99, le succès de ce disque fut phénoménal. En plus de garder la première place au palmarès de jazz Billboard, l'album gagna des Grammy® dans deux catégories : meilleure performance vocale de jazz, et album de l'année, une catégorie où Krall faisait concurrence à des stars comme Santana, les Backstreet Boys, Les Dixie Chicks et TLC. Il va sans dire que ce n'est pas banal pour un musicien de jazz acoustique pratiquant l'improvisation de se trouver en compétition avec des grands artistes du monde du rock, du country, de la musique appelé 'urban', et avec des stars 'teen-pop' dans une catégorie des Grammy®. Et ce n'est pas tous les jours non plus qu'un musicien de jazz qui improvise devient une grande vedette au festival Lilith Fair, fondé par la chanteuse/compositeur Sarah McLachlan et mettant de l'avant des artistes 'pop rock' et 'pop' féminins.

Pourtant, en 1998, Krall subjugua sans difficulté un auditoire jeune et majoritairement féminin qui avait certainement plus d'affinité avec Sheryl Crow ou Alain Morissette qu'avec Abbey Lincoln ou Chris Connor. Aux Etats-Unis, When I Look in Your Eyes devint un disque platine (on en a vendu plus d'un million); au Canada se fut un disque double platine; au Portugal, platine, et disque d'or en France. En 200, il gagna le prix Juno dans la catégorie Meilleur album vocal de jazz. Après ce disque, il était difficile de faire mieux. Pourtant, le disque suivant de Krall, The Look of Love, a atteint des volumes de vente impressionnants lui aussi.

Quand il est sorti en septembre 2001, il eut la neuvième place au palmarès Billboard 200, et on en vendit 95 000 exemplaires aux États-Unis la première semaine. En plus de devenir disque platine quadruple au Canada et disque platine en Australie, Nouvelle Zélande, Pologne et au Portugal, The Look of Love est un disque d'or en France, au Singapore et en Grande Bretagne. Au Canada, l'album gagna le prix Juno dans trois catégories : Meilleur artiste, Meilleur disque et Meilleur album vocal de jazz. Gracieuseté de Verve Music Group http://www.vervemusicgroup.com/